le 6 janvier 2010, Sam Bot revient !

 

Fiche détaillée : Sam Bot, T1 - Sam Bot
Dessinateur Raoul Buzzelli
Scénario Pipo Franco
Editeur Delcourt G. Productions
Préface signée de Bernard Joubert
Date de parution janvier 2010
Collection Erotix
ISBN 2756020664

Dossier de presse par Bernard Joubert

LES POCKETS ITALIENS PER ADULTI

Ils étaient une distraction populaire par excellence, petits (13 X 18 cm), pas chers, déversés à flot chez les marchands de journaux. Méprisés par la critique, haïs de la censure, c'était les pockets de BD pour adultes, publiés en France par Elvifrance, mais originaires d'Italie.

À l'origine du phénomène, dans les années 1960, il y a ce que les Italiens appellent les fumetti neri, des bandes dessinées policières dont les héros sont plus souvent les délinquants que les forces de police. Ils se nomment Diabolik, Satanik ou Kriminal, réussissent leurs cambriolages et tuent sans état d'âme.

En 1966, Giorgio Cavedon et Renzo Barbieri, un journaliste du Corriere della sera, lancent les éditions Sessantasei (66), qui deviendront bientôt Erregi (les initiales de leurs prénoms, R et G), puis se scinderont en deux maisons concurrentes et leaders du marché, Ediperiodici et Edifumetto. Ils ne font plus simplement dans la BD peu morale, mais dans le fumetti per adulti. Ils proposent des héros malfrats (Al Capone, Bonnie, Goldrake connu en France sous le nom de Goldboy), mais aussi des récits de cape et d'épée (Isabella, très inspiré d'Angélique marquise des Anges) et de jungle (Jungla, dessiné par Stelio Fenzo, un assistant d'Hugo Pratt). Le réalisme prime, l'humour n'a pas encore droit de cité.

Les ingrédients censés intéresser un public adulte peuvent varier d'un titre à l'autre, mais l'un d'eux, l'érotisme, est toujours présent. Les audaces se limitent à des poitrines dénudées les premières années avec, de temps à autre, la suggestion de relations sexuelles. Dans les années 1970, on ose la représentation des sexes, puis la pornographie. L'horreur est un genre qui connaît un net succès (Terror, Oltretomba, Cimiteria), avec des séries mensuelles atteignant plusieurs centaines de numéros. Les héroïnes vampires sont nombreuses (Jacula, Zora, Sukia). D'autres récits s'inspirent de faits-divers (Attualità nera, Storie nere, I Casi della vita) et la condition sociale de certains héros vise à l'identification des lecteurs : ouvrier (Il Montatore), chauffeur routier (Il Camionista), taulard (Sbarre), appelé du contingent (Il Tromba et Primo, traduits en France dans Salut les bidasses)... Certaines séries sont conçues comme d'interminables feuilletons (Maghella, Lucifera). D'autres présentent un même personnage dans des récits complets (Mortimer, Pippo). Mais les récits complets indépendants, sans héros récurrents, plaisent tout autant (A porte chiuse, Storie blu, Corna vissute). Les tirages oscillent entre 65 000 et 80 000 exemplaires.

En France, c'est la maison Elvifrance (1970-1992), dirigée par Georges Bielec, qui domine de façon hégémonique le marché des traductions. Selon un sondage des années 1970, les ouvriers forment 54 % de son lectorat, qui est à 82,5 % masculin. Et on ne peut imaginer une chambrée militaire où ne circulent pas des Elvifrance. Mais la censure veille, persuadée que les adolescents usent de ces pockets pour parfaire leur éducation sexuelle. Et les censeurs ont raison ! Terrificolor, on le pique à son grand frère. Prolo, on sait que papa le cache dans un coin de l'atelier. La censure interdit à tour de bras, mais Elvifrance ne cesse de sortir de nouvelles séries pour remplacer celles tombées au champ d'honneur. Et finalement, dans les années 1990, ce qui, en France comme en Italie, fait disparaître des kiosques les pockets pour adultes, c'est l'érosion du marché.

SAM BOT, L'AFFAMÉ BIEN MONTÉ

Sam Bot, ça me botte ! Évidemment, le jeu de mot ne fonctionne qu'en français. En Italie, notre héros s'appelle Peter Paper, ce qui rappelle vaguement le Peter Parker de Spider-Man, mais ne prête guère à rire. Être plus drôle dans sa version française qu'italienne, en raison de la traduction bourrée d'argot et de jeux de mots de Georges Bielec, c'est d'ailleurs une des particularités de Sam Bot et une des raisons qui en firent un titre emblématique d'Elvifrance, dont on se souvient trente ans après.

On s'en souvient aussi parce que ce héros sortait de l'ordinaire. Un anti-héros, un incroyable loser. Un peu chétif, portant des grosses lunettes et un costume ringard, il n'a que deux obsessions dans la vie : manger et, pour cela, trouver du travail. Chômeur affamé, il postule à tous les emplois qui se présentent, mais se trouve embringué dans des complications rocambolesques qui le ramènent à son point de départ, c'est-à-dire dans sa chambrette miteuse, devant un frigo vide. Côté cœur, en revanche, il est aidé. Il est amoureux de sa voisine, la belle Orchidée, qui lui ouvre volontiers son lit. Car Sam possède une botte secrète qui fait se pâmer toutes les femmes légères croisant sa route : un grand sexe. Pour dire la vérité, il préférerait un bon steak, mais les nymphomanes ne lui demandent pas son avis.

En Italie, Peter Paper connut trente-deux aventures mensuelles, réparties en trois séries (dont une intitulée Identikit), de 1972 à 1978. Les créateurs étaient Raoul Buzzelli au dessin et Pippo Franco au scénario, lesquels passèrent la main à d'autres auteurs au fil des numéros. La censure ne se manifesta pas en Italie, mais frappa sévèrement en France. Après sept numéros, Sam Bot fut interdit d'exposition chez les marchands de journaux, et le resta durant six mois. Durant ce temps, le journaliste Delfeil de Ton prit plusieurs fois sa défense dans Charlie hebdo : " Il n'y a rien dans "Sam Bot" qui puisse justifier une interdiction. Quand je lis "Sam Bot", moi, j'y retrouve des échos de la bonne saine grossièreté, du bon gros jeu de mots, de la superbe incongruité que je trouvais, quand j'étais petit, à la lecture des "Pieds-Nickelés". […] Il faut être bien aveuglé par les critères de "bon goût" et de "vulgarité" pour se désintéresser de la liberté d'expression de "Sam Bot". Se désintéresser du sort de "Sam Bot" (et des autres), comme tout le monde le fait, c'est pratiquer le racisme culturel, c'est s'aveugler sur les vraies lectures populaires, c'est ne pas voir les faits "culturels" où ils sont. " Bravo DDT !

RAOUL BUZZELLI

Frère cadet de Guido Buzzelli (1927-1992), un des maîtres de la bande dessinée italienne que traduisait en France Charlie mensuel, Raoul Buzzelli (1932-1982) ne se fit pas un prénom dans le métier. À la fin des années 1950, il collabore à des journaux pour enfants comme Fantasie Gioconde, y dessinant les Aventures spatiales du prof Barbon. Il fait du lettrage, du retouchage de matériel étranger... Sam Bot est son titre de gloire, avec quelques récits complets dans EP Risate, traduits en France dans EF Popcomix. Contrairement à son malchanceux héros, il finit par jeter l'éponge et se suicida.

 

PIPPO FRANCO

Né en 1940, cet acteur de films comiques n'est pas allé chercher loin son pseudonyme puisque, pour l'état civil, il est Franco Pippo. Son grand nez et ses rôles de ratés ridicules ne sont pas sans rappeler le personnage de Sam Bot. Il reste encore très connu en Italie comme animateur de télévision et chanteur, dans la lignée d'un Patrick Topaloff. Sam Bot fut sa seule incursion dans la bande dessinée.


Avis de la Fnac : Sam Bot, T1 - Sam Bot

Fleuron des Editions Elvifrance, spécialisées dans les petits formats érotiques publiés dans les années 1970, Sam Bot, antihéros timide et chômeur mais doté par la nature d’autres avantages appréciés des dames, est enfin réédité !

Bonne nouvelle : Sam Bot est de retour ! Pour les moins de vingt ans, ce nom ne veut probablement rien dire. Mais pour tous ceux qui se délectaient à lire en cachette, dans les années 1970, les publications des Editions Elvifrance, spécialisées dans les « petits formats » érotiques, il rappellera sans aucun doute quelques souvenirs... Petit retour en arrière : en ce temps-là, la censure veillait avec soin sur les lectures des jeunes (et des moins jeunes). La libération des mœurs n’était pas encore entrée dans les habitudes, même si la vogue du cinéma classé X commençait à envahir les écrans, et même si Valéry Giscard d’Estaing ferait en sorte, après son élection à la présidence de la République en 1974, de faire sauter quelques verrous. En ce qui concerne l’édition, et en particulier la bande dessinée, des messieurs en gris armés de ciseaux et de bons sentiments faisaient encore la pluie et le beau temps, persuadés qu’ils protégeaient la morale et la bienséance. Il n’était pas question de laisser publier n’importe quoi, et les Editions Elvifrance allaient bientôt expérimenter les affres d’une censure aussi tatillonne que bête et méchante. Leurs différentes publications étaient importées d’Italie, pays où des éditeurs de BD quasi-industrielle produisaient à la chaîne des séries destinées à un lectorat populaire, pas toujours signées par leurs auteurs. Les nostalgiques se souviennent encore de Jacula, de Lucifera ou de Terror. A vrai dire, rien de bien méchant ni de contraire aux bonnes mœurs, et ces BD dites « de gare » feraient sans doute rire doucement les ados d’aujourd’hui qui se demanderaient pourquoi diable elles étaient interdites aux mineurs… Sam Bot, né en 1973, ajoutait à une dimension gentiment érotique un contenu humoristique tiré par les cheveux et qui ne faisait pas toujours preuve d’une très grande finesse. Mais les jeux de mots foireux et les calembours douteux, parfois inventés par le traducteur Georges Bielec qui était par ailleurs le gestionnaire d’Elvifrance, donnaient toute son originalité à la série. L’argument de Sam Bot tient en quelques mots : cet antihéros au physique ingrat, chômeur « professionnel » toujours à la recherche d’un boulot, affublé d’une grosse paire de lunettes et handicapé par une timidité maladive, ne possède qu’un seul atout dans la vie : un sexe d’une taille, comment dire… propice à enflammer l’imagination de ses voisines ! « Vous possédez là une énorme fortune », lui fait un jour remarquer un tatoueur. « Savez-vous qu’on pourrait y caser le premier acte des Jeux de l’amour et du hasard ? » Précisons que le dessinateur ne montrait jamais les attributs de ce pauvre Sam, et que ses ébats, menés le plus souvent à son corps défendant, étaient dessinés avec la plus grande pudeur… Petit détail amusant, son nom dans la version originelle italienne était Peter Paper, comme un clin d’œil au Peter Parker qui se transformait en Spider-Man dans la BD américaine de Stan Lee et Steve Ditko. Et c’est vrai qu’il existe une certaine ressemblance entre les deux personnages, aussi timides et maladroits à la ville qu’irrésistibles - pour des raisons différentes – dans certaines circonstances… Sam Bot, séducteur malgré lui, était très demandé par les jeunes filles de son entourage mais aussi par un lectorat aujourd’hui disparu : les bidasses, contraints de supporter de longues heures de train avant de rejoindre leurs casernes, et qui trouvaient là matière à délassement et, peut-être aussi, à fantasmes plus ou moins avouables… Dessiné par Raoul Buzzelli, le frère du grand Guido Buzzelli, édité en France à plusieurs dizaines de milliers d’exemplaires, Sam Bot retrouve aujourd’hui une nouvelle jeunesse. On le lira au premier ou au second degré, on s’amusera de ses mésaventures sentimentales et l’on frémira souvent à la lecture de ses calembours, mais peu importe : publié aujourd’hui dans l’excellente collection Erotix dirigée par Vincent Bernière aux Editions Delcourt, agrémenté d’une passionnante préface signée de Bernard Joubert, l’ami Sam va enfin retrouver la notoriété qu’il mérite…


Le Mot de l'éditeur : Sam Bot, T1 - Sam Bot

Sam Bot est un jeune Anglais binoclard qui a un problème : la nature l'a particulièrement bien doté ! Du coup, la gent féminine le harcèle, mais lui n'en a que faire. Préférant travailler, il est souvent réquisitionné par son oncle Archibald, un vieux grincheux, qui l'envoie dans de périlleuses missions visant à récupérer des objets pour son musée des horreurs. (Ce volume comporte 3 histoires.)

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