Il était une fois... Biancaneve

1ère partie


Couverture originale de Biancaneve, peinte par Alessandro Biffignandi

Le conte :
Blanche neige et Walt Disney, deux noms qui resteront associés ensemble à jamais, comme celui d'Edgar Rice Burroughs à Tarzan ou celui d'Hergé pour Tintin.
Blanche neige, un personnage enfoui dans l'inconscient collectif de tout enfant ou grand enfant, ayant lu, ou simplement ouvert un livre de contes et qui aura gardé en mémoire le souvenir précis et manichéen du bien contre le mal, avec la fin heureuse que tout le monde connaît. Cette jeune fille d'ailleurs n'est pas née, ni sous le crayon de Disney, ni sous celui de n'importe quel autre dessinateur, mais dans une célèbre fable inventée par les frères Grimm en 1811 ou 1815.


Celluloïd original provenant du long métrage de Walt Disney, Blanche neige et les sept nains.

Cependant personne ne peut oublier un seul instant, d'après la vision qu'en a faite Walt Disney, cette frêle jeune fille courant dans les bois, ses vêtements s'accrochant de branches en branches avec la vision terrifiante mais imaginaire, de démons, sorcières et diables grimaçants, cherchant par tous les moyens à s'emparer d'elle. Cette vision cauchemardesque se terminant par la chute de la jeune fille dans une clairière lumineuse et salvatrice entourée de charmants petits animaux de la forêt venus pour la réconforter… J'aurais pu vous parler ici du personnage pour enfants bien connu de tous, mais c'est une tout autre histoire qui nous intéressera ici. Une histoire oui, mais un conte d'où les enfants seront exclus ! Et pour cause, Biancaneve se rattache ici au personnage des fumetti per adulti, donc de la bande dessinée pour adultes.
 
Un joli con de fée :
Le 18 novembre 1972 en Italie, un nouveau personnage fait une timide apparition mais sera amené, à brève échéance, à devenir un titre phare dans l'univers des fumetti et à générer un genre nouveau : la Fable érotique.
Cette nouvelle héroïne porte un joli nom médiéval et mondialement connu, Biancaneve. Cette série paraitra donc aux éditions "Edifumetto" (plus tard aux "Edt Squalo"), ayant été créée par Renzo Barbieri et Rubino Ventura, elle se distinguera surtout par une progressive "italianisation" du personnage.

Si Biancaneve a le mérite de réinventer la satire en Italie (au moins dans les fumetti), il ne faut pas oublier pour autant le précurseur dans ce domaine qu'a été par exemple Maxmagnus de Magnus et Bunker, Biancaneve ne prenant qu'avec sage décision le pas suivant, en incluant à la mode italienne un doux parfum de libertinage. Très vite l'histoire évoluera vers un contexte de plus en plus érotique, qui finalement deviendra pornographique, tout simplement à cause de la demande.
 
Dans le contexte libéral et novateur des années 70 en Italie (pendant un temps du moins), ce petit format érotique sera dessiné dans les premiers temps par Leone Frollo, surnommé le "lion de Venise". Biancaneve aura donc toutes les qualités pour faire des débuts fracassants sous la plume "del maestro".

En France, Biancaneve a été éditée dans les Contes Malicieux et non dans son propre titre, du numéro 1 au numéro 71, sans doutes pour éviter toute équivoque sur les présentoirs des libraires et éviter des quiproquos très gênants pour les parents qui auraient du fournir une explication à leurs enfants, en leurs refusant l'achat de cette "douce fable". En effet, Contes Malicieux n'étant pas interdit d'affichage dans les premiers numéros, si le titre s'était appelé de son nom traduit et donc logique de Blanche neige, cela aurait créé les quiproquos assez gênants dont j'ai parlé ci-dessus. Et bien sûr, les interdictions de niveaux 2 ou même 3 (interdiction d'affichage et de publicité) seraient arrivées beaucoup plus tôt. Donc, dans le n° 1 d'octobre 1974 (1ère sortie en France), l'histoire commence à peu près de la même façon que le conte ou le dessin animé de Walt Disney (pour référence) qui est plus connu par le grand public. Mais les premières pages passées, on s'aperçoit que Blanche Neige se trouve être plus dévêtue que sa consœur du grand écran et que la trame évolue très vite vers une histoire libertine.
Elle suivra quand même un chemin plus ou moins parallèle à celui de l'héroïne des frères Grimm. La belle mère, et donc de ce fait la sorcière, le miroir magique, les sept nains et le prince charmant, sont tous présents pour vous rappeler en mémoire la fable de votre enfance. Elle sera même enceinte d'un beau prince charmant, en fait un tailleur d'origine très modeste, possédant un "engin" de trente centimètres, condition sine qua non pour épouser la belle. Le ton érotico-burlesque sera ainsi donné à la série et ne s'arrêtera plus !
De plus, si dans le dessin animé d'origine bien connu de tous, les nains ont une attention toute paternelle à l'égard de la jeune fille et portent des noms comme Dormeur, Prof, Grincheux, Atchoum, Simplet, Joyeux, Timide, en Italie, dans cette série pour adultes, ce sera plutôt (en français) Tringleur, Mateur, Rude-Bite, la Branlette, Trouduc, Tantine, Floppée. On ne peut pas dire, et à juste raison, que tous auront les mêmes manières que leurs homologues du dessin animé de Walt Disney, non pas vraiment...

Les 26 premiers numéros sont bien entendu les plus intéressants, tant au niveau des histoires qu'au niveau des dessins qui sont vraiment fantastiques.
Leone Frollo fait intervenir des personnages tout aussi savoureux que Naga, la belle mère de Blanche Neige, qui est donc mariée à Kurt, le roi de la Kurtlandie et père de Blanche neige. La sorcière lesbienne, Belinda, engagée au départ par Naga pour capturer la jeune fille, finira par se ranger du coté de cette dernière. La tradition du conte de fée amènera des êtres aussi étranges que des centaures, des hommes ailés, un satyre (ce qui ne nous étonne guère), des fées nymphomanes, un être moitié homme moitié femme, un autre avec une langue extensible, des lutins, des nains pervers…
Si vous possédez la série ou si vous ne l'avez pas encore, vous pourrez y trouver tout ce qui fait le charme des contes pour enfants, mis à la "sauce poivre vert".
Blanche Neige y joue son rôle d'ingénue à merveille dans les premiers épisodes, minaudant et jouant hypocritement avec son pouce dans sa bouche, ou n'importe lesquels de ses doigts d'ailleurs, comme pour vous signaler qu'elle ne comprend pas ce qui se passe, la culotte baissée jusqu'aux genoux et l'air étonné.
 
Biancaneve en Italie & en France :
La série Biancaneve en Italie comporte 94 numéros, et, chose étrange, la numérotation recommence au numéro 1 à chaque début d'année.
Un exemple : les deux premiers numéros datent de 1972 (novembre et décembre) et la numérotation reprend à partir du n° 1 pour l'année 1973 jusqu'à décembre, idem pour 1974.
Dès 1975, la série ne s'arrêtera plus, jusqu'au dernier numéro en 1978, le n°68 "Magia d'oriente". A partir de cette date, le succès aidant, les éditeurs décideront de faire paraître deux numéros par mois, pour par la suite, et dès l'année 1977, revenir au rythme d'un épisode par mois. Cela provient sûrement de la baisse des ventes dues à la mauvaise qualité des scénarios ainsi que du dessin qui était devenu très moyen.
Edoardo Morricone, qui a repris les dessins de la série de 1975 à 1977, restera toujours dans l'ombre de Frollo. Se contentant au début de reprendre (décalquer) des vignettes de ce dernier, pour par la suite essayer de se lancer, il ne fera malheureusement que donner libre court à sa médiocrité…
Je sais, je suis sévère et je m'en excuse, mais son dessin est bien fade quand on le compare à Magnus ou Frollo, pour ne citer qu'eux et certains pourront dire qu'il y a pire et c'est vrai, mais c'est dommage que pour un tel personnage, un effort n'ai pas été fait pour les dessins et les scénarios qui manquent cruellement d'imagination, surtout après les numéros 30/35.
A contrario, l'héroïne Maghella, qui se rapproche de Biancaneve par certains points, verra son dessin et ses scénarios augmenter en qualité et ce, grâce à l'immense talent du dessinateur Dino Leonetti (1937-2006) et des textes d'Arrasich (voir mon article sur Maghella).
On peut trouver aussi des numéros spéciaux qui sont appelés là-bas des supplementi (suppléments), ce que nous en France, avons l'habitude d'appeler des Hors série.
Il y en aura dix en tout de 1974 à 1990, avec deux numéros pour l'année 1980 et deux numéros pour l'année 1981.
-1974 ''Il genio del peto'' (supplément a Nobel n° 17), Edoardo Morricone
-1975 ''Biancaneve ye' ye'' (supplément al n° 13), Edoardo Morricone
-1977 ''Compleanno érotico'' (supplément al n° 54), "Studio… ?"
-1979 ''Biancaneve sotto i nani'' (supplément a Odeon n° 2), Dino Leonetti & Mario Janni, Nicoletta Riso.
-1980 ''I sette nani e la strega safica'' (supplément a Lando n° 158), Leone Frollo
-1980 ''Biancaneve contro tutti'' (supplément a Vipera Bionda n° 34), Dino Leonetti, Mario Janni, Nicoletta Riso.
-1981 ''Biancaneve contro micciolina'' Fumetti Folk (collection Grandi successi comici), "Studio Leonetti".
-1981 ''Il mago nero'' Fumetti Folk (collection Grandi successi comici), Mario Janni, Nicoletta Riso.
-1982 ''Il maléficio de la strega'' (supplément a Batty & Gay), Leone Frollo
-1990 ''Biancaneve à New York'' (supplément a Fumetti Click n° 2), Leone Frollo.
Pour visualiser les couvertures voir dans ''Galerie d'images, Biancaneve et les supplementi''.
 
Des rééditions de la série courante sortiront dès l'année 1973, un an seulement après la parution du numéro 1, ce qui est assez rare pour le souligner.
Parus sous le label I nobel del fumetto, sortent un n° 7 en 1973, un n° 22 en 1974, et le n° 51 en 1977, avec bien entendu de splendides couvertures, exécutées par Fernando Tacconi et inspirées des dessins de Leone Frollo. En revanche, seule la dernière couverture du n° 51 sera dessinée par ce dernier.
Cependant, la numérotation et l'ordre chronologique de la série ne sera pas du tout respectée, c'est donc pour cela que l'on retrouvera en réédition, le n° 1 avec le n° 6, le n° 7 avec le n° 2 et le n° 3 avec le n° 11. Heureusement, cette série anachronique ne durera le temps que de trois numéros (voir ci-dessous).


La couverture originale peinte à l'aquarelle par Fernando Tacconi

En 1975, et ce, jusqu'à 1976, sortira un superbe essai, mais apparemment raté, de rééditer la série en couleur et en grand format sous le titre un peu ronflant de Biancaneve best seller, qui avortera au huitième numéro. C'est bien dommage car ils étaient vraiment très beaux. Cette fois-ci, les couvertures ne sont pas inédites et reprennent tout simplement celles imprimées pour les premiers numéros.
Comme le proverbe le dit, "jamais deux sans trois", en 1983 la série redémarre encore une fois en petit format, sous le titre de Super-Biancaneve, mais même avec de très belles couvertures inédites de Leone Frollo, la série s'arrêtera au n° 6.

 


Super Biancaneve n° 1 et n° 2 montrant les couvertures inédites dessinées par Leone Frollo,
avec des exemples de planche originales de ce dessinateur.

Frollo reprendra également le personnage de Biancaneve pour une histoire assez courte de quinze pages, parue dans le titre Odéon n° 15 de la 2eme série en 1978 et en petit format. Déjà en 1977, dans les numéros 3 et 7 de la première série qui était en grand format, il fera les deux couvertures avec des dessins inédits (voir chapitre sur les supplementi). Et si dans le n° 3 le dessinateur de l'histoire est Alberto Del Mestre, pour le n° 7 il n'y aura aucune histoire sur Blanche neige, mais juste une couverture (voir plus bas les supplementi).
A ma connaissance, la dernière tentative se situe en 1988 avec la reprise en gros volumes et grands formats, pour le tome 1 et 2, des six premières histoires de Biancaneve, mais les vignettes sont légèrement remontées, et très légèrement tronquées, ce qui donne un aspect assez "balourd" au livre (voir ci-dessous).
Là aussi, apparemment, c'est l'échec et ce, malgré de très belles couvertures inédites de Leone Frollo. Il n'y aura donc que trois volumes, et le dernier reprendra l'aspect original des petits formats, avant de disparaître…


Tome 1 reprenant les premiers épisodes de la série Biancaneve, dessins de Frollo

On trouve aussi cette très belle réédition de 1994 d'un supplementi de l'année 1980, "I sette nani e la strega saffica" contenant des dessins et une couverture de Frollo. La reine Naga qui, cette fois-ci y est mise en valeur, est une reprise de la couverture du I nobel del Fumetto n° 51 de 1977 "Week end con Biancaneve".
En 2000, Renzo Barbieri et Graziano Origa décideront de rééditer le n° 1 de l'année 1972 en fac-similé dans une présentation "collector" sous pochette plastique, sous le label Mitici Squalo numero uno.
De temps en temps, il y aura une réédition d'un épisode, le plus souvent une histoire complète d'un supplementi, comme avec les séries Shock ou Clik Fumetti (ci-dessous).

 

Concernant la France, la série commence au n° 1 en 1974 et s'arrêtera au n° 71 en 1980. Elle paraîtra ensuite occasionnellement dans la série Satires dans les numéros 9, 10, 11, 12, 50 ainsi que dans la série Spéciaux EF dans les numéros 2, 4, 9, 11, 14, 24. Les particularités et détails pour ces numéros seront exposés plus loin, dans la seconde partie consacrée à la censure au chapitre supplementi, avec le listing complet des pages manquantes et des dessinateurs et encreurs ayant participé à ces numéros. Pour visualiser ces couvertures, voir dans "Galerie d'images - Biancaneve et les spéciaux EF, Satires, Joyeuses Story".
Il faut noter que le talentueux dessinateur de Maghella, Dino Leonetti, aidé par Mario Janni, a dessiné dans le n° 2 de la série Spéciaux EF et pour le n° 24, c'est le "Studio Leonetti", que l'auteur lui-même dirigeait, qui dessina cette aventure.
On trouvera un épisode isolé de Biancaneve, dessiné par Leone Frollo, dans le n° 6 de 1987 de la série Joyeuses Story qui est tiré d'un supplementi qui date de 1982 "Il maleficio della strega" (le seul en grand format 15,5cm x 23cm). A l'origine, cette histoire aurait du paraitre dans un numéro de la série Spéciaux EF (dépôt préalable du 10 février 1983), mais fut finalement éditée dans le Joyeuses Story n° 6. Etant soumis au dépôt préalable, ce numéro, qui fut tiré à 1 seul exemplaire -notez le bien- en tant que microtirage (voir ci-dessous à gauche) pour être présenté à la commission de censure, fut refusé, mais ressortit quelques temps plus tard dans la série Joyeuses Story, dans le n° 6 du 20 février 1987 et avec le même titre : "Change pas d'main…".
 
Les dessinateurs de la série complète ainsi que des suppléments et numéros isolés sont dans l'ordre chronologique : Leone Frollo, ensuite Edoardo Morricone, Alberto del Mestre, Dino Leonetti, Mario Janni et Nicoletta Riso, et ayant collaboré à la série Paolo Chiarini.
Dans les premiers numéros de la série Contes Malicieux, on pourra noter qu'il n'y eut -chose importante- absolument aucune censure. Mais comme cette maison d'édition aura d'énormes problèmes à partir d'une certaine date, ils furent obligés de faire des coupures pour éviter le couperet tranchant de la censure. Cela ne servira à rien d'ailleurs, car comme tout le monde le sait ici, l'aventure "Elvifrance" se terminera en 1992, mais ceci est une autre histoire…
 
Pour l'anecdote, la série Biancaneve aura eu tellement de succès en Italie qu'ils en firent un film en 1982, "Biancaneve & co", avec l'actrice Michela Miti, qui sortira en France sous le titre de "Blanche Neige et les 7 sadiques" (disponible en vhs et en dvd depuis 2007 en Italie). Le personnage aura tellement d'impact que son auteur Renzo Barbieri fera tirer une étiquette de vin représentant le visage souriant de Blanche neige, seul petit produit dérivé sur notre érotique héroïne (voir l'article les contes parodiés, visible sur ce site).

 

Couvertures et peintures :
Je voudrais ouvrir une parenthèse pour parler des illustrateurs des couvertures des fumetti per adulti, qui sont en fait des artistes peintres pour la plupart, venant plus ou moins de l'univers du dessin, de l'affiche de cinéma, de l'illustration et de la publicité…
Ce qui caractérise le travail et la production "d'Elvifrance", c'est l'uniformité de l'ensemble des couvertures, et ce n'est pas péjoratif, mais plutôt à mon avis une excellente marque de fabrique.
Cependant, il faut bien le signaler, si elles ne sont pas toutes du même niveau -et c'est bien normal-, elles ont tout du moins le mérite de rehausser certaines histoires ou certains dessinateurs complètement insipides.
Il vous suffira de prendre un petit format, en choisissant si possible de la qualité : Maghella, Contes-Malicieux, Lucifera, Contes-Satyriques, Contes-Féérotiques, Outre-Tombe, Terror, Jungla, Zara, etc…pour vous rendre compte que certaines couvertures sont travaillées plus que d'autres, mais que toutes, au fond, méritent que l'on s'y attarde, ne serait-ce que deux ou trois secondes pour regarder le travail de l'artiste.
Par ailleurs, c'est un véritable casse-tête pour certaines collections que de s'amuser à différencier les différents dessinateurs ou peintres illustrateurs qui ont travaillé pour ce genre de productions : Alessandro Biffignandi, Averardo Ciriello, Fernando Carcupino, Stelio Fenzo, Magnus, Leandro Biffi, Roberto Molino, Pino Dangelico, Taglietti, Karel Thole, Marcarini, Alessandro Chiarolla, le Studio Rosi, Busletta, Bozzoli, Montorio, Leone Cimpellin, Mario Cubbino, Sandro Angiolini
 
Le plus connu, et sûrement un des plus prolifiques, est assurément Alessandro Biffignandi, ainsi que son confrère Averardo Ciriello, qui a fait toutes les couvertures de Maghella et quasiment toutes celles de Lucifera. Mis en contact avec Renzo Barbieri par un ami en commun, dans les années 60, ils décideront de s'associer pour travailler ensemble. Renzo Barbieri le laissera totalement libre dans son travail et lui fera totalement confiance pour ses œuvres. Renzo Barbieri dira de lui : "il a fait 50% des couvertures de mes productions", et à n'en pas douter cela est sûrement vrai. Quand on voit et que l'on reconnaît son style (à ne pas confondre avec celui de Pino Dangelico), on se rend compte d'une chose : quel travail et quelle production ! ! ! Ainsi, quand vous avez un petit format "Elvifrance" dans les mains, vous avez pratiquement une chance sur deux pour que la couverture ait été faite par Alessandro Biffignandi ! Pour la série qui nous intéresse ici, Biancaneve, c'est très simple, elles sont toutes de lui, sauf les numéros allant de 52 à 59 en Italie (Contes Malicieux de 67 à 69 en ce qui concerne la France). Cette série de huit numéros a été faite par Leone Frollo, mais ce ne sont pas des couvertures originales mais tout simplement des agrandissements de vignettes, en général des splash pages (pleines pages) avec d'ailleurs un effet très réussi (voir ci-dessous).

 

 

  Biancaneve et la censure

2eme partie

Tout d'abord, comme signalé dans l'article précédent, vous savez tous que la série Française des Contes malicieux n'eut que 71 numéros.
En Italie par contre, la série Biancaneve compte 84 numéros répartis en deux séries : de 1972 à 1974 pour la première et de 1975 à 1978 pour la deuxième.
Les 26 premiers numéros sont dessinés par Leone Frollo, puis la suite fut reprise par le dessinateur Edoardo Morricone et terminée enfin par Alberto Del Mestre et Mario Janni.
Pour vous donner une idée, voici la collection complète numérotée en Italie :
-1972 n°1 et 2.
-1973 n° 1 à 12.
-1974 n° 1 à 12.
-1975 n° 1 à 23.
-1976 n° 24 à 47.
-1977 n° 48 à 59.
-1978 n° 60 à 68.
Mais parlons maintenant de la censure en France.
Sachez que les premiers numéros des Contes malicieux du n° 1 au n° 26 ne sont pas censurés, ce qui est une aubaine pour les collectionneurs du dessinateur Leone Frollo.
Toutefois, dès le n° 28 (qui correspond au n° 2 de 1975 en Italie), il manque tout de même 38 planches, ce qui assez impressionnant.
De par ce fait, qui reviendra assez souvent, cela aurait dû décaler complètement les histoires, mais la solution sera très habilement trouvée en supprimant des planches dans un autre numéro pour rétablir l'équilibre, ce qui aboutira à la suppression, chose fort dommage, de certaines couvertures originales italiennes. En réitérant ces infamantes coupures, sans aucune raison d'ailleurs, car les scènes enlevées n'ont rien de choquantes (ou presque rien), cela donne un effet de manque dans les histoires si elles sont décelées.
En fait soyons honnêtes, comme les scénarios de cette série se suivent et se ressemblent, il est très difficile de voir ces coupures, car Blanche Neige entre deux aventures, je cite : "reprend son cheval et repart à l'aventure"…" et ainsi de suite. Je pense plutôt que ces coupures sont dues à un effet de "raccourci" de l'éditeur Français "Elvifrance", mais pour quelle raison, je n'en sais rien…et j'aimerais avoir certains éclaircissements sur le sujet.
Dans les derniers numéros dessinés par A. Del Mestre et M. Janni, il y eut quand même des scènes censurées à cause d'une certaine violence (axée surtout sur la torture) inhérente à l'époque où vivait Biancaneve.
Il y eut un dessinateur inédit en France, Paolo Chiarini, qui participa à la série sur 2 numéros italiens, le n° 46 de 1976 et le n° 54 de 1977, son style graphique étant complètement pompé sur le style de Magnus, ce dernier l'ayant fait travailler d'ailleurs sur sa série mythique Alan Ford.
 
La censure en France, listing :
Voici maintenant un aperçu des pages et couvertures manquantes dans la version Française, en vous donnant le nombre de planches à l'origine de la numérotation Italienne et si possible en indiquant en face le numéro qui correspond avec la version française.
 
-Il manque 38 planches du n° 2 de 1975.
-Il manque 94 planches du n° 3 de 1975, couverture inédite en France.
-Il manque 107 planches du n° 4 de 1975, histoire et couverture inédites en France.
-Il manque 85 planches du n° 5 de1975, couverture inédite en France.
-Le n° 13 de 1975, couverture inédite en France.
-Il manque 1 planche du n°14 de 1975 / le n° 41 en France.
-Il manque 49 planches du n° 24 de 1976 / le n° 46 en France.
-Il manque 31 planches du n° 25 de 1976 / la couverture a été utilisé pour le n° 57 en France.
-Il manque 108 planches du n° 29 de 1976, histoire et couverture inédites en France.
-Il manque 108 planches du n° 34 de 1976, histoire et couverture inédites en France.
-Le n° 38 de 1976, couverture inédite et c'est la couverture du 25 qui a été utilisé pour le n° 57 en France.
-Il manque 2 planches du n° 39 de 1976 / le n° 58 en France.
-Il manque 2 planches du n° 41 de 1976 / le n° 60 en France.
-Il manque 2 planches du n° 42 de 1976 / le n° 61 en France.
-Il manque 2 planches du n° 43 de 1976 / le n° 62 en France.
-Il manque 3 planches du n° 44 de 1977 / le n° 63 en France.
-Il manque 108 planches du n° 45, histoire et couverture inédites en France.
-Il manque 108 planches du n° 46, histoire et couverture inédites en France.
-Il manque 108 planches du n° 47, histoire et couverture inédites en France.
-Il manque 108 planches du n° 48 / le n° 64 couverture inédite en France.
-Il manque 108 planches du n° 49, histoire et couverture inédites en France.
A partir de ce numéro, les histoires sont un peu chamboulées entre l'édition française et l'édition italienne.
-Le n° 50 Italien a été édité dans le n° 65 Français avec la couverture du supplementi de 1980: ''Biancaneve sotto i nani''.
-Le n° 51 de 1977 italien est le même que le n° 66 en France.
-Il manque 108 planches du n° 52 de 1977, histoire et couverture inédites en France.
-Le n° 53 de 1977 est le même que le n° 67 édité en France.
-Il manque 108 planches du n° 54 de 1977, histoire et couverture inédites en France.
-Le n° 55 de 1977 est le même que le n° 68 en France mais pas avec la même couverture.
-Le n° 56 de 1977 est le même que le n° 69 en France.
-Il manque 108 planches du n° 57 de 1977, histoire et couverture inédites en France.
-Le n° 58 de 1977 est le même que le n° 70 en France mais pas avec la même couverture.
-Le n° 59 de 1977 est le même que le n° 71 en France mais pas avec la même couverture.
-Il manque 8 planches du n° 60 de 1978 / le n° 9 de Satires en France ''nous y revoilà avec le miroir''.
-Il manque 8 planches du n° 61 de 1978 / le n° 10 de Satires en France ''Erika la suédoise''.
-Le n° 62 de 1978 a été édité en France dans le n° 11 de Satires ''Lancelot dans le lac''.
-Le n° 63 de 1978 a été édité dans le n° 11 de Les Spéciaux EF ''La flûte enchantée''.
-Il manque 108 planches du n° 64 de 1978, histoire et couverture inédites en France.
-Il manque 108 planches du n° 65 de 1978, histoire et couverture inédites en France.
-Le n° 66 de 1978 a été édité dans le n° 12 de Satires ''Pour tout l'or du Rhin''.
-Il manque 12 planches dans les deux derniers numéros n° 67 et n° 68 édités et réunis en France dans un seul numéro Les Spéciaux EF n° 9 ''Magie d'Orient''.
 
A noter qu'en Italie, des couvertures originales de la série courante ont resservi pour des supplémenti. Il s'agit des couvertures (en Italie) de Biancaneve ''Il genio del peto'' qui est tirée du Biancaneve n° 44 de 1976 (n° 63 en France), de la couverture (censurée d'ailleurs) de ''Biancaneve contro Micciolina'' qui est tirée du Biancaneve n° 43 de 1976 (n° 62 en France), de la couverture (censurée aussi) de ''Il mago nero'' qui est tirée du Biancaneve n° 8 de 1974 (voir n° 22 en France), ainsi que Biancaneve ''Il maleficio della strega'' qui est tirée du Biancaneve n° 4 de 1974 (n° 18 en France). Deux autres couvertures serviront pour des rééditions, il s'agit respectivement du numéro 1 de 1975 (n° 27 en France) et du n° 9 de 1974 (n° 23 en France) qui seront utilisées toutes les deux pour la série Fumetti click n° 1 et 2.
Petite anecdote, le n° 25 italien "Il paese dei Fumetti" narre l'histoire de Biancaneve aux pays des bandes dessinées où elle rencontre différents héros comme Mandrake, Superman, Playcolt, Zora… Inutile de vous faire un dessin sur la suite de l'histoire, mais en tout cas, à 99%, elle est inédite en France et c'est bien dommage.
Entre autres, un des épisodes passés à la trappe est celui où Biancaneve se retrouve sur la lune; eh oui la lune, après l'avoir montrée à tour de bras, elle se retrouve dessus. C'est d'ailleurs, une histoire complètement inédite en France, et la liste est bien longue… ! Chose étrange, dès que la science fiction pointait le bout de son nez, l'éditeur rechignait apparemment à faire paraître ces histoires, comme ce fut le cas pour Maghella. 

 

Les supplementi :
-1974 ''Il genio del peto'', il manque 28 planches dans la version française : Les Spéciaux EF. n° 2 ''Coriolan'', la couverture française est tirée du n° 65 de Biancaneve italien, dessins de l'histoire Edoardo Morricone.
-1975 ''Biancaneve ye'ye'', il manque 30 planches dans la version française : Satires n° 50 ''un coup de mage et ça repart'', dessins de l'histoire Edoardo Morricone.
-1977 ''Compleanno érotico'', il manque 200 planches, Histoire et couverture inédites en France, dessins de l'histoire "Studio …?" (c'est le même tâcheron qui dessina et coula les derniers épisodes de Naga/Shatane) et couverture avec une splash de Leone Frollo.
-1979 ''Biancaneve sotto i nani'', il manque 12 planches dans la version française : Les Spéciaux EF n° 2 ''La croqueuse de diamant'', la couverture française est tirée du n° 61 de Biancaneve, dessins de l'histoire sur des crayonnées et encrage de Dino Leonetti pour les 100 premières pages et ensuite un encrage de Mario Janni ainsi que de Nicoletta Riso à partir des pages 100…
-1980 ''I sette nani e la strega safica'', il manque 200 planches, tout le livre est inédit en France ainsi que la couverture, dessins de l'histoire Leone Frollo.
-1980 ''Biancaneve contro tutti'', il manque 29 planches dans la version française : Les Spéciaux EF n° 14 ''Blanche neige contre tous'', dessins de l'histoire par des crayonnées de Dino Leonetti et un encrage de Mario Janni et à plus faible niveau, de Nicoletta Riso et du "Studio Leonetti".
-1981 ''Biancaneve contro micciolina'', il manque 206 planches : Histoire et couverture inédites en France, dessins de l'histoire du "Studio Leonetti" et la couverture est une reprise du n° 43 de 1976, mais cette fois ci censurée.
-1981 ''Il mago nero'', il manque 30 planches dans la version française : Les Spéciaux EF n° 24 ''Requiem pour un orgasme'', dessins de Mario Janni, encrage Nicoletta Riso et la couverture est une reprise du n° 8 de 1974, mais cette fois ci censurée (en France numéro 22).
-1982 ''Il maléficio de la strega'', grand format avec une couverture qui est une reprise du n° 8 de 1973 (n° 18 en France), l'histoire a été éditée complète et sans aucune censure dans Joyeuses Story n° 6 ''Change pas de main'', dont la couverture provient du numéro 1 de la série italienne Fradiavolo de 1974, dessins de Leone Frollo.
-1990 ''Biancaneve à New York'', il manque 208 planches, Histoire et couverture inédites en France, dessins de Leone Frollo.
Toutes les couvertures des supplémenti sont de Alessandro Biffignandi, sauf celui de1977 qui est de Leone Frollo. J'ai aussi trouvé d'autres numéros mais qui ne sont pas classés officiellement comme étant des supplementi mais plutôt à mettre dans du ''divers''. Il existe en effet 4 numéros de la revue Odéon, en moyen format: -n° 3 de 1977 "Natashia la bagascia", 15 planches par Alberto Del Mestre (couverture de Biancaneve par Leone Frollo).
-n° 7 de 1977 (juste une couverture de Biancaneve par Leone Frollo).
-n° 15 de 1978 "Favonius" 15 planches par Leone Frollo, parution en petit format (inédit en France).


Aventure inédite de Bianceneve, avec sur la droite une planche originale de cette histoire par Leone Frollo.

Couvertures censurées ? :
Lors de la première édition en Italie du n° 1 en 1972 et jusqu'au dernier numéro, les couvertures ont toutes été peintes par Alessandro Biffignandi, mis à part l'encart des huit numéros dessinés par Frollo, comme déjà signalé plus haut.
En les regardant, vous vous apercevrez que toutes les couvertures représentant Biancaneve dans toute sa nudité ont des sous-entendus plus ou moins légers…et c'est bien normal pour des fumetti per adulti, en revanche cela allait bientôt changer.
Par la suite, il y eu en Italie ce que l'on appelle des Ristampa, c'est à dire des rééditions totales ou partielles d'une série, dues tout simplement au succès des personnages.
Mais malgré l'accueil réservé à Biancaneve, la série n'eut pas la chance comme ses deux consœurs, Maghella et Lucifera, d'être remise sur le marché de la vente, mis à part pour quelques numéros éparses ou certaines tentatives, hélas avortées. Il est vrai que lorsque l'on voit la ''qualité'' des derniers numéros, cela n'est pas très étonnant…
Doit-on alors parler de censure pour ces rééditions ? En effet, sur quelques couvertures de Maghella ou Lucifera en rééditions, on peut trouver -oh surprise !- des vêtements sur les attributs (on va dire sexuels) des personnages, les seins, pubis et même de temps à autre, sur le ventre ou les épaules… Mais pourquoi tout à coup cet accès de pudibonderie ? Sans doute à cause d'un contexte politique...ou d'une certaine pression de certains organismes cléricaux ou autres…
Ces Ristampa ou Collezione en Italie se sont bizarrement autocensurés en mettant des habits sur toutes (ou presque) les couvertures de Maghella. Il est même arrivé chez nous que l'éditeur "Elvifrance" se serve d'une de ces rééditions italiennes comme couverture pour l'édition française, pour un numéro ou une couverture d'album relié. D'où une confusion et une croyance en une censure française, qui existait bien, certes, mais juste pour les histoires et non pas pour les couvertures. J'ai depuis peu les réponses à toutes ces questions, au bout de 4 années de recherches, qui feront bientôt l'objet d'un article complet sur ce site.
 
Biancaneve en voyage :

Dans ses aventures, Biancaneve a beaucoup voyagé, laissant un peu partout son empreinte, et pour vous le prouver, voici quelques éditions étrangères : -1er ligne, Edt Italienne, Edt Française, Edt Néerlandaise (Pays-Bas). -2eme ligne Edt Danoise, Edt Espagnol, Edt Brésilienne. 
 
Galerie de couvertures peintes par A. Biffignandi :
Voici un bel aperçu de quelques unes des couvertures originales peintes par Alessandro Biffignandi, où l'on pourra distinguer la finesse et la précision des coups de pinceaux (ce qui ne fut pas toujours le cas), et se rendre compte qu'il avait la passion de peindre cette héroïne très charnelle et sensuelle, bien que sa préférée reste Zora, à ce qu'il m'avait confié lors de notre correspondance écrite.

 
Couverture inédite, par Alessandro Biffignandi qu'il m'a faite sur commande. 2009

 

Galerie de dessins par Leone Frollo :

Pour rester dans le même thème et voir si le bon vieil adage "une image vaut mieux qu'un long discours" fonctionne toujours, voici quelques dessins originaux de Leone Frollo qui se passent de commentaires tant la perfection graphique est au rendez-vous. Jugez-en plutôt.

 

Le thème de la fable érotique dans la bande dessinée commencera donc vraiment en 1972, avec l'arrivée sur le marché de Biancaneve. Sa venue engendrera dans la foulée une quantité de titres érotiques, tous plus ou moins axés sur les contes de fées et seront dirigés en premier vers un érotisme léger, qui progressivement montera en flèche. Cette cassure de genre, ce besoin de parodier, arrivera en Italie quand les films comiques à connotation légères et aux sous-entendus sexuels prendront le pas sur les simples comédies. Cet effet parodique de se moquer des conventions fera donc que Biancaneve aura un énorme succès et se verra hissée au somment des titres et des ventes (pendant un certain temps du moins). Il y a toujours eu des connotations sexuelles aux contes de fées et ils ont été analysés de tout temps, mettant en avant les reflets cachés de nos envies et de nos peurs. La bande dessinée érotique des fumetti per adulti prendra le relais en montrant simplement au travers d'un support visuel érotique et humoristique ces mêmes contes, en faisant vivre par l'image toutes ces héroïnes de la littérature enfantine. C'est pourquoi l'homme a toujours eu le désir, l'envie évidente de vouloir parodier et détourner les souvenirs de son enfance, peut être aussi pour essayer de s'en détacher un peu au final. Ce fut évidemment chose faite et réussie avec la série Biancaneve.
FIN

 

Des planches originales de BIANCANEVE

 -Quelques couvertures italiennes de Biancaneve-

Galerie d'images - BIANCANEVE les couvertures censurées de la série normale.

Galerie d'images - Biancaneve et les supplémentis italiens.

Galerie d'images - Biancaneve et les spéciaux EF et SATIRES.

Galerie d'images Biancaneve Maghella et Lucifera censurées.

 

-Galerie de couvertures de Contes Malicieux-

-Les couvertures d'Elvifrance-

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